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L'historien Jacques Dreuilhe nous en dit un peu plus:
Saint-Médard, évêque de Noyon, mort en 560, n'est pas connu simplement pour sa charité envers les pauvres et bien entendu pour le dicton sur la pluie mais aussi, comme le veut la tradition, pour être à l'origine de la fête de la rosière. Nous apprenons ainsi qu'il aurait voulu encourager la vertu sur son domaine de Salency (Oise) qu'il tient de son père.
Il aurait donc ordonné ce qui suit: « Chaque année, les habitants du village s'assembleront et, après avoir apprécié les mérites des jeunes filles, arrêteront leurs suffrages sur trois d'entre elles. Ces jeunes filles seront alors présentées au seigneur de Salency, en l'occurrence Saint-Médard, qui choisira celle qui lui paraîtra la plus méritante. L'élue recevra une rose ou un "chapel de roses" (couronne de 12 roses) symbole de sa vertu ainsi qu'une somme de 25 livres en matière de dotation (...). »
Ainsi à Moissac, le 17 juin 1787, le premier consul Gouges-Cartou propose de fonder un prix de vertu. Le conseil, sous la présidence du maire, le baron de Savignac, va délibérer dans ce sens: « La société n'atteindra jamais à sa perfection tant que la main qui inflige les peines au crime ne donnera pas sa récompense à la vertu. En attendant le jour qui verra éclore le chef- d'oeuvre du législateur, il est digne de vous, Messieurs, de tâcher de suppléer à l'insuffisance de nos lois sur cet article, dans un temps surtout où le vice marche la tête levée et où les personnes du sexe féminin semblent avoir publié que la pudeur est le plus bel ornement de la beauté et qu'elle semble embellir la laideur même (...). » Si le ton moralisateur de ce texte fait sourire aujourd'hui, cette délibération est un témoignage intéressant de l'atmosphère « fin de règne » que connaissait Moissac, à 2 ans de la Révolution! Ainsi, avec l'accord du conseil, Gouges-Cartou s'engage pour y consacrer annuellement, sa vie durant, la somme de 100 £; il en sera de même pour le conseiller à la Cour des Aides Duprat pour 30 £.
Le prix était attribué alternativement un an aux jeunes gens de la ville et un an aux jeunes gens de la campagne. Chacun des élus désignait alors des jeunes gens et des jeunes filles de bonnes mœurs reconnues pour participer, à leurs côtés, à la fête. Précédés de deux fifres et de deux tambours, ils allaient en cortège prendre à leurs maisons ou à l'entrée des faubourgs les deux élus pour les conduire à l'hôtel de Ville. Ces derniers y étaient reçus par les consuls en robe et couronnés de fleurs.
Nous n'avons pas d'éléments pour dire si le premier prix de vertu a été décerné le premier dimanche de mai 1788. On peut facilement imaginer que les évènements révolutionnaires ne pouvaient laisser un tel loisir d'autant plus que la tradition n'était pas (encore) ancrée dans les habitudes des Moissagais.
C'est Dominique Claverie qui sera à l'origine de la relance de la tradition de la rosière à Moissac, en 1888. Mais le legs testamentaire fait par cet horloger de la rue Gambetta ne se traduira dans les faits qu'en 1899.
Depuis, à l'exception des périodes de guerre et de la tragique année 1930 (inondation), Moissac a toujours couronné une rosière, voire même plusieurs au début du siècle.
A l'orée du XXIe siècle, cette tradition au charme un brin désuet semble comme hors du temps, une institution que personne ne songerait à déboulonner.
