(Well… suite à ce message, et d'autres reçus de membres de 35mm-compact déçus, je vais essayer de préserver mon densitomètre afin que vous puissiez continuer à bénéficier de ses services…)
Je copie ici la réponse faite à deux questions qui m'ont été posées par un membre du forum ayant joué le jeu du test à la lecture de la courbe de son film test, je pense qu'elles peuvent intéresser tout le monde.
Un membre de 35mm-compact a écrit :*pourquoi n'y a-t-il pas d'épaule comme on en voit sur les courbes des fabricants ? Mon film donne l'impression de "grimper aux arbres" dans les hautes lumières !
Les courbes publiées par les fabricants sont le résultat de test faits avec un autre matériel d'exposition des émulsions qu'un simple appareil photo. Ils utilisent des sensitogrammes, bandes tests présentant toute la gamme des densités de gris allant de la transparence totale à la plus forte opacité (sachant que le noir absolu n'existe pas concrètement, mais qu'il y a des opacité plus opaques que d'autres). L'émulsion est exposée sous un éclairage dont la puissance est parfaitement calibrée, tant en température de couleur (celle-ci influent sur la sensibilité relative d'une émulsion) qu'en intensité. En effet, pour calculer exactement la sensibilité d'une émulsion, en rapport à la norme ISO, il faut connaître le niveau exact de lumination nécessaire pour que le film enregistre une information. La norme ISO détermine la sensibilité d'une émulsion en tenant compte du point d'exposition nécessaire à ce que cette émulsion présente une densité située à 0,10 points de densité au dessus du voile de base de la dite émulsion.
S'agissant du l'épaule de courbe, les films modernes sont capables de monter très haut avant de bloquer. Il faut surexposer de 7 à 9 IL pour observer un tassement significatif. Cette caractéristique serait un bonheur si les densités atteintes (de l'ordre de 2,8 à 3,2) étaient tirables. Dans de telles densités, la lumière des agrandisseurs peine à trouver son chemin. Tu as pu constater combien les hautes lumières étaient difficiles à faire venir sur un tirage, demandant de doubler, tripler et plus les temps d'exposition de base pour obtenir un semblant de matière dans les HL. Et je parle ici de hautes lumières situés à +5 ou 6 IL au dessus du point de référence. Imagine le sport à +9IL, non compté les effets secondaires avec les agrandisseurs à condenseurs qui accroissent la perte d'efficacité dans ces zones noires (effet Callier).
Accessoirement, lorsque nous faisons avec notre cher matériel les tests de sensitométrie, il est évident que l'on est en présence de deux paramètres non constants en plus de celui de l'émulsion que l'on teste : l'appareil et l'éclairement de notre sensitogramme de fortune. Ceci explique en partie l'irrégularité de la courbe. De plus, les vitesses peuvent être plus ou moins exactes, notamment pour les vitesses rapides. Idem pour les ouvertures de diaphragme, rarement justes à pleine ouverture. Mais si tu procèdes d'un film à l'autre en utilisant peu ou prou les mêmes valeurs de couple d'exposition, tu ne tardes pas à repérer les trous ou pics qui peuvent être attribués à l'appareil. De même, dans les basses vitesses d'exposition (qui simulent les HL), l'écart de l'émulsion à la loi de réciprocité peu commencer à ce faire sentir (ce qui en l'occurrence induirait une légère sous exposition et donc plutôt un tassement de l'épaule de courbe).
Mais les défauts du test sont leur principal intérêt. Que nous importe en effet une belle courbe de laboratoire avec un gamma constant pour notre pratique de la photographie où nous exposerons nos films de manière non théorique? La courbe pratique permet elle de savoir précisément comment réagit notre émulsion développée de telle façon selon son niveau d'exposition. En lisant ta courbe, tu sais comment se comporte ton film dans les basses lumières et peux éventuellement en tenir compte à la prise de vue, idem pour les hautes lumières où tu pourras voir, selon les niveaux de densité atteints, là où elles commenceront à bloquer lors du tirage. Par ailleurs, la mesure du contraste (le fameux gamma) t'en donne exactement le niveau pour ton cas de figure. Idem pour la vérification du bon temps de développement avec l'indice idoine (entre 0,75 et 0,85, tu sais que tu es dans les clous). Et la comparaison de courbes faites avec son matériel sur différentes combinaison d'émulsion et de révélateurs / temps de développement te permet de te constituer une base de référence utile pour adapter sa pratique sur le terrain en fonction des conditions d'éclairement rencontrées.
Un membre de 35mm-compact a écrit :*est-ce que le fait d'une densité proche de 1 (0.94 ici) à logE 0 est particulier à la sensibilité du film (100/400 Iso ?) ou indépendant de cette sensibilité et n'est rien d'autre que le point de départ de la mesure sensito ?
Tout d'abord, la valeur des log(E) est purement théorique. J'ai arbitrairement pris un log(E) égal à 0 pour représenter l'exposition correcte du film (zone V en Ansel Adamsien). Pour calculer le log(E), il faut un luxmètre qui donne le niveau exact de l'éclairement de la surface photographiée. Le posemètre de l'appareil est un luxmètre qui converti d'office cette donnée en valeur d'exposition. Il existe une formule pour convertir cette donnée en lux, mais cela est sans grand intérêt autre que mathématique.
La densité en revanche est celle mesurée par le densitomètre et donc est exacte. Globalement, les films donnent tous une densité de cet ordre pour une exposition en zone V. Densité qui dépend également du voile de base qui diffère d'une émulsion à l'autre (selon le support, polyester ou acétate et de la coloration résiduelle de la couche anti-halo). Cette densité que l'on va considérer comme étant de base déterminera le temps moyen d'exposition requis pour tirer le négatif sur papier à densité "'normale". Plus cette densité est élevée (ou faible) plus les temps moyens au tirage le seront dans les mêmes proportions. Ce qui nous intéresse est la progression des densités d'une zone à l'autre. Si en zone III tu as une densité de 0,6, de 1 en zone V et de 1,6 en zone VII - densités qui résultent des valeurs du sujet - tu peux en déduire que pour une densité qui restitue correctement les proportion des valeurs du sujet au tirage il te faudra faire monter la zone VII dont la densité s'écarte de 0,6 points par rapport à la zone V alors que la zone III s'en écarte que de 0,4.
Pour répondre enfin exactement à ta question, la sensibilité d'un film est sa capacité à enregistrer une lumination plus où moins faible. Pour un éclairement identique, une ISO 100 ne réagira que deux valeurs d'exposition plus tard que l'ISO 400. Mais il n'y a aucune raison pour que cela ne se traduise pas sur le film par une densité quasiement identique (en dehors des caractères autre tels que la nature du support, la couche anti-halo). En revanche, selon le contraste liée au développement, la zone V sera plus ou moins éloignée de ce point de départ. Si ton film est contrasté, la valeur de la densité de la zone V relative à la zone I sera plus forte que pour un film faiblement contrasté. C'est la pente de la courbe qui détermine cette valeur de contraste (le Gamma), tout comme on détermine la pente d'un col afin de le classer en 4ème ou hors catégorie, selon la raideur, et effrayeur ainsi les malheureux coureurs cyclistes (dont notre très cher Sévérus…).