L'espace, le temps, la photographie

[hyperfocale]

Bonjour,

Songez, pratiquants de la photographie astronomique, que quand vous photographiez des objets lointains, par exemple la grande galaxie d'Andromède, distante de 2,2 millions d'années lumière (ce qui est très près, à l'échelle de l'univers), ces quelques photons épars qui viennent tout bêtement s'embourber dans le gélatinobromure d'argent de votre pellicule, après une dernière pirouette dans le réseau des lentilles de votre optique, ont parcouru une distance énorme (que nous vous laissons calculer), et qu'ils sont partis de cette galaxie quand il n'y avait pas encore d'humains ni de vrais préhumains sur cette planète.

En plus, ces photons sont une infime partie de tous ceux qui ont été émis dans toutes les directions de l'espace et du temps, quand ils se sont lancés...

Qui plus est, ils vous donnent un image de la galaxie d'origine qui n'a plus rien à voir avec sa réalité actuelle (en 2,2 millions d'années, elle a sûrement bien changé).

Bref, ce que vous photographiez, ce n'est que le furtif fantôme d'un passé déjà révolu bien avant votre intention de le photographier. En plongeant dans l'espace, vous vous enfoncez dans le temps, et votre matériel de prise de vue n'est plus qu'une machine à remonter le temps (une vraie et qui fonctionne).



En fait, et c'est valable pour tous les amateurs (et pas seulement ceux qui oeuvrent en astronomie), toute la photographie n'est qu'une machine à remonter le temps, de quelques secondes, minutes, heures, jours, années, siècles... Comme nous le montre la vision de chacune des images que nous avons réalisées, et qui obligatoirement nous renvoient toutes dans ce passé, le temps de leur examen.

Mais, elle est aussi une machine d'éternité, bien que travaillant pourtant sur l'instantané, puisque cette fraction de temps infime (quelques centièmes de secondes en règle générale) est alors figée, suspendue, pour toujours, ou tout au moins pour des durées qui peuvent désormais dépasser quelques siècles, avec nos technologies actuelles.

Attention, cependant : ce que nous voyons, c'est juste une image du passé, et pas le passé lui-même qui nous demeure innacessible jusqu'à plus ample informé, contrairement au futur qui reste atteignable à certains d'entre nous, et pour une durée plus ou moins limitée.

Oui, mais alors, c'est qu'il est devenu le présent, pour nous. Et, le futur aussi, au sens strict du terme, nous est donc interdit. Tout comme il l'est à la photograhie, d'ailleurs, qui se se contente "in fine" du présent, saisi à la volée, le temps d'un clin d'obturateur...

Cordialement.

[zorglub]

cette belle réflexion me fait penser aux motivations génitrices de l' invention de la photographie

[Eusaebius]

Ouh pinaiz' c'est beau ce qu'il dit, hyperfocale...