Je ne partage donc pas ton affirmation " un combat qui concernait les serbes, macédoniens et autres bulgares", car, tout au contraire, ce Front n'était qu'un prise à revers dans un conflit essentiellement franco-germanique, devenu mondial par le jeu des alliances. Les Balkaniques avaient déjà réglé leurs comptes pendant les "guerres balkaniques" (1912-1913). Lorsque la guerre de 1914 a éclaté entre la France et l'Allemagne, les pauvres Macédoniens se sont donc retrouvés, bien contre leur gré, pris en tenaille entre deux blocs ennemis : la France et ses alliés locaux (Serbie, Grèce, Italie, Russie), face à l'Allemagne, alliée à l'Autriche-Hongrie et à la Bulgarie). S'il y a des victimes d'un conflit qui leur est étranger, ce sont bien les pauvres paysans de la région, à peine libérés du joug ottoman.
On a d'ailleurs des exemples de pauvres bougres qui ont combattu alternativement avec les Français et Serbes et avec les Allemands et Bulgares, sans qu'on sache très bien ni pourquoi ni comment. Un décret de 1923 a cité Bitola à l'ordre de l'Armée et l'a décorée de la Croix de Guerre ; c'est bien parce que nous avons reconnu que sa destruction, lors de ses longs mois de bombardements, de 16 à 18, était un dommage collatéral du conflit qui nous opposait au bloc germanique.
Quant aux soldats français qui sont tombés là-bas, loin de chez eux, ils n'étaient ni mieux ni moins bien lotis que leurs frères de Verdun. Des hivers un peu frisquets aussi, des maladies, mais une guerre de tranchée statique et peu intense, qui les avait fait surnommer, en France, les "jardiniers de Salonique", avec beaucoup de mépris, par comparaison aux Poilus de France, qui devaient essuyer quotidiennement des nuées de bombes, obus et mitraille.
On constate d'ailleurs, à l'examen des fiches relatives au soldats inhumés dans les tombes de Skopje et Bitola, que beaucoup sont morts d'accident ou de maladie, souvent après l'Armistice. Ceux qui sont morts au combat sont probablement encore dans la terre du mont Pelister ou, au mieux, dans les ossuaires anonymes.
Mon frère a été un artisan essentiel de la construction du Mémorial qui s'y trouve et 'il a personnellement organisé et suivi la restauration des 6252 tombes (réfection des croix et sablage/peinture/refonte des plaques), en plus d'un minutieux travail de saisie et d'indexation des registres nominatifs et de rapprochement avec les fiches "mémoire des hommes", qui recensent tous les "morts pour la France" (
https://www.memoiredeshommes.sga.defens ... re_guerre/)
Depuis 2015, la Direction de la mémoire, des patrimoines, et des archives (DMPA), a aussi dans ses cartons un projet d'édition d'un ouvrage illustré sur les cimetières militaire français à l'étranger. S'il sort un jour, tu verras (j'espère) que c'est mon frère qui a réalisé les images des cimetières de Skopje et Bitola mais en numérique...