La procédure que j'ai suivie est tirée du bouquin d'Ansel Adams "The negative", à savoir:
1) Test de la sensibilité ISO du film, c'est à dire prise de vue en zone 1
2) Etalonnage du dév via une prise en zone 8
Les résultats de ces deux séries d'essais sont évalués en toute rigueur au densitomètre. Ne disposant pas d'un tel appareil, j'ai imaginé un process de mesure à l'aide de l'agrandisseur et de ma cellule.
J'ai donc monté sur le mur de mon labo un vieux drap beige, mis l'appareil à environ 80 cm, mise au point à l'infini pour obtenir un nega homogène. Bien qu'étant disposé à l'intérieur, j'ai utilisé la lumière naturelle en ouvrant tout simplement la porte, ce qui permettait de doser facilement la quantité de lumière nécessaire. J'ai testé également à l'extérieur, mais on ne fait que rajouter des contraintes (un nuage qui passe durant les shoots, c'est un essai raté).
Il est très important de s'assurer que la lumière de la surface prise en photo soit constante sur tout l'angle de vue. Pour ma part, j'ai vérifié cette condition à l'aide de mon spotmètre 1°. J'avais tout au plus un écart de 0.1 EV sur toute la surface photographiée (ce qui m'a rendu assez fier, il faut savoir de temps en temps s'autocongratuler

Première série d'essais: Mesure de la sensibilité effective de l'émulsion
Je mesure au spotmètre, réglé sur 400 ISO, le gris 18% (zone 5). Je trouve par exemple f4 t=1/60 s. Je ramène cette mesure Z5 en zone 1: f11 t=1/125. Puis je prépare la séquence suivante:
Vue ISO considéré f t
1 - - -
2 400 11 1/125
3 500 11+1/3 1/125
4 640 11+2/3 1/125
5 800 16 1/125
6 320 8+2/3 1/125
7 250 8+1/3 1/125
8 200 8 1/125
Il faut que pendant toute la durée des shoots, la lumière soit constante. D'où l'intérêt d'être en intérieur... Pour ma part, j'ai mesuré régulièrement que cela ne variait pas.
La vue 1 est une vue avec bouchon sur l'objectif (donc sans exposition du film) pour pouvoir mesurer la densité du voile de base du néga. Par la suite il faudra soustraire à la densité de chaque vue cette densité de base car ce qui nous intéresse est la densité relative.
Etape suivante: on développe suivant le process habituel. Pour moi c'est D76 Jules 20°C 12 minutes, 30 s de retournements initiaux, puis 5 retournements toutes les 3 minutes.
Une fois le nega sec, on mesure la densité de chaque vue, idéalement au densitomètre. Ansel Adams nous enseigne que la densité relative de la zone 1 est idéalement comprise, pour un agrandisseur à condenseur (comme mon krokus 3), entre 0.08 et 0.11. La vue qui se rapproche le plus de cette valeur idéale me donne la sensibilité effective de l'emulsion (par exemple, s'il s'agit de la vue 6, alors l'émulsion possède une sensibilité de 320 ISO, valeur à considérer dorénavant).
Pour ma part, j'ai trouvé que la trix 400 pro en format 135 a une sensibilité de 400 ISO ==> j'avais d=0.09 pour la vue 2. Ouf !
Bien entendu, il est préférable de répéter cet essais plusieurs fois en se débrouillant pour avoir des paramètres de shoot assez variés, que ce soit en diaphragme qu'en vitesse. J'ai refait une série d'essais avec des vitesses de 1/15 et une autre à 1/30. Il faut bien sûr se débrouiller en terme de lumière pour avoir en corollaire des diaphragmes utilisables (et pas des f64 par exemple pour un objo de 50 mm). C'est comme cela aussi qu'on s'aperçoit que les vitesses du boitiers sont un peu fantaisistes (je sais maintenant que mon 1/15 se rapproche certainement plus du 1/8).
Deuxième type d'essais: Recherche du temps de développement nominal
Pour ce type d'essais, on prend tout pareil, sauf qu'au lieu d'exposer pour la zone 1, on expose en zone 8.
Donc, re-tout le toutim: mesure en spot du gris 18% (en considérant la sensibilité effective déterminée précédemment!) et report en zone 8. Par exemple la Z5 me donne f16 t=1/125, en z8 j'aurai f5.6 t=1/125
Ensuite, on définit le schéma de prises de vue:
Vue ISO f t Commentaire
1 - - - Voile
2 400 16 1/125 Zone V
3 400 5.6 1/125 Zone VIII
4 - - - Voile
5 400 16 1/125 Zone V
6 400 5.6 1/125 Zone VIII
Une vue pour le voile de base, une vue en Z5, une vue en Z8. J'ai répété le schéma deux fois pour m'assurer de la constance des densités obtenues.
Ensuite rebelote: on dév le temps habituel, on sèche et on mesure. Cette fois, A. Adams nous dit que, toujours pour agrandisseur à condenseur, la densité idéale doit être comprise entre 1.15 et 1.25 pour la zone 8 et entre 0.6 et 0.7 pour la zone 5.
Si cela n'est pas le cas, il faut refaire les vues, et modifier le temps de développement en fonction, en sachant qu'augmenter le temps de dev augmente en parallèle la densité et inversement. Il peut être aussi utile de rajouter dans les vues une prise en zone 1 pour s'assurer de la stabilité de cette densité (théoriquement c'est indépendant du temps de développement).
Mes premier résultats avec 12 minutes à 20°C m'ont donné une densité de 0.95 pour la Zone 5 et 1.78 pour Z8, ce qui est très supérieur aux valeurs attendues...
Le graphique ci-dessous montre la totalité des essais que j'ai effectués cet été:
en abscisse le temps de dev D76 Jules 20°C (en secondes)
en ordonnée la densité relative obtenue
J'affiche aussi les intervalles de densité idéaux tels que définis par Ansel Adams

Les points de droite représentent les résultats du développement Jules tel qu'on le connait: 12 min à 20°C. C'est quand même pas terrible...
Le temps de dev optimal obtenu est de 8 min 45s environ. Mais quand on regarde les points autours de 8min30s, quelques secondes de plus ou de moins donnent une densité totalement différente.
Quelques hypothèses peuvent expliquer cela:
1) vitesses du boitier aléatoires
2) diaphragmes de l'objectif faux
3) méthode de mesure de la densité défectueuse
4) Problèmes de révélateur
5) méthode Jules instable
Après réflexion, je pense que c'est l'hypothèse 5 qui expliquerait cette dispersion dans les résultats:
J'ai fait suffisamment de tests à différentes vitesses de boitier pour écarter ce problème.
Question diaphragme? Il me faudrait faire des essais spécifiques pour le vérifier. C'est dans les cartons
Méthode de mesure de la densité? Possible. Un contributeur du forum m'a indiqué une solution technique pour mesurer cette densité. C'est aussi dans les cartons.
Le révélateur? J'ai fait tout comme il faut. Mes deux flacons de D76 avaient été préparés un mois avant, j'avais fait seulement deux rouleaux avec. Je stocke dans des bouteilles accordéons. Et à la fin, mon révélo était toujours clair, comme si je l'avait préparé la veille...
J'en arrive à incriminer la méthode Jules, qui est présentée dans les forums comme étant une méthode stable. Franchement j'ai des doutes et je pense que je vais passer à une méthode de dev à bain perdu (D76 stock ou 1+1).